25 janvier 2011

Une campagne pour les Etats-Unis d'Europe

Paris, 25 janvier. La démonstration quasi-quotidienne des insuffisances de l’UE a conduit l’Union européenne des fédéralistes que préside en France Jean-Guy Giraud à prendre l’initiative d’une campagne pour les Etats-Unis d’Europe, se fixant pour objectif 2014, année de renouvellement du Parlement et de la Commission mais aussi centième anniversaire du premier suicide de l’Europe.
Une réunion s’est tenue le 22 janvier en présence de Michel Albert, président d’honneur de l’Union des fédéralistes et animée par Jean-Guy Giraud, à laquelle assistaient des représentants de diverses associations, dont ARRI, ainsi que Virgilio Dastoli, ancien proche collaborateur d’Altiero Spinelli et actuellement président du Mouvement européen d’Italie. Elle a fait apparaître un accord quasi-unanime sur la formule des Etats-Unis d’Europe à la condition que soit mis en avant le principe de solidarité qui distingue notre Union de la fédération américaine.
L’effort accompli pour surmonter la crise et améliorer la gouvernance économique de l’Union (fonds de stabilisation, agences de supervision, semestre européen), si important soit-il n’est pas suffisant pour garantir à terme la solidité de l’union monétaire et répondre aux attentes des peuples. Il reste à doter l’Union de ressources propres, à autoriser le recours à des emprunts européens, pas seulement pour alléger le fardeau des pays en difficulté mais aussi assurer au programme 2020 un meilleur sort que celui qu’a connu l’agenda de Lisbonne, à perfectionner la gouvernance économique en procédant à des assainissements budgétaires assez progressifs pour ne pas briser la reprise, enfin à réguler les marchés financiers et à amorcer l’harmonisation de la fiscalité des entreprises. J’ai personnellement appelé l’attention sur l’opportunité d’un programme intégré en faveur des jeunes sans emploi qui pourrait combiner les moyens de la politique sociale, de la formation professionnelle et des encouragements aux échanges transnationaux, programme qui donnerait de l’Europe une image positive.
L’allergie des gouvernements à la réouverture du chantier institutionnel n’a pas empêché Angela Merkel d’obtenir l’élaboration d’un amendement aux traités. Notre conviction est qu’il est temps de préparer une nouvelle étape sur la route qui doit conduire notre continent à son unité politique, étape qui pourrait se situer symboliquement entre les dates anniversaires du premier conflit mondial né en Europe de la division des Européens. Parmi les réformes institutionnelles, la plus importante concerne l’abolition en tous domaines du droit de veto, étant entendu qu’un pays minoritaire a désormais la faculté de se retirer de l’Union. Ce pourrait être le moyen de s’assurer de la volonté de tous et d’abord des Britanniques de poursuivre l’œuvre entreprise. La proposition du député fédéraliste britannique Andrew Duff prévoyant l’élection d’un petit groupe de députés européens sur des listes transnationales mérite d’être soutenue comme étant de nature à donner un caractère réellement européen à la campagne. La présentation par les principaux partis d’un programme européen et non d’une addition de programmes nationaux et celle d’un candidat pour la présidence de la Commission sont la condition pour une plus forte participation aux élections européennes. Enfin, l’éclatement de la représentation de l’Union et de la fonction exécutive est un facteur de faiblesse qui pourrait être corrigé en réunissant sur la même tête les fonctions de président de la Commission et du Conseil européen, réforme dont Virgilio Dastoli nous a rappelé qu’elle est permise par le traité de Lisbonne.
Il nous reste à faire partager cette conviction d’abord en France avant d’aborder le débat au niveau européen. J’ai proposé que nous nous adressions au Mouvement européen - France dont c’est la vocation, afin de savoir s’il serait disposé à promouvoir ce projet, à fédérer les initiatives et à porter le débat au niveau européen. Au vu de sa réponse, nous apprécierons quelle suite donner à notre action.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Cher Monsieur,
Je pense que vous vous trompez sur l'abolition du droit de veto et sur la fusion des présidences de la Commission et du Conseil. 
Abolir le droit de veto équivaudrait à supprimer l'ensemble des compétences exclusives des Etats membres, non seulement leur autonomie fiscale, mais surtout leur souveraineté en matière de police, de défense et de politique étrangère: ce serait décreter un centralisme radical et l'abolition des Etats, au prétexte d'une lenteur et d'un risque d'échec somme toute propres à toutes les recherches de compromis. Au contraire, l'Europe doit et peut progresser plus rapidement dans les vastes domaines dont elle détient déjà la compétence, grace à la transformation du parlement en véritable chambre législative.
Mais en fusionnant les présidences de la Commission et du Conseil, on réduirait automatiquement le role du Parlement. Le président de la Commission ne pourrait et ne devrait pas présider une chambre (le Conseil) dont il serait étranger, puisque non issu d'elle. En effet, dans toute organisation un tant soi peu démocratique, la Présidence est inséparable de la responsabilité. 
La fusion des Présidences  impliquerait donc que le Président de la Commission soit un Chef d'Etat en exercice, ou à tous le moins qu'il soit désigné par les Chefs d'Etats, et qu'il exerce une double responsabilité, envers les Chefs d'Etat membres et envers le Parlement. En pratique, les Chefs d'Etats contrôleraient le nouveau Président encore plus étroitement qu'aujourd'hui, et ce au détriment des parlementaires et de l'esprit fédéral. 
Au contraire, le président de la Commission devrait être issu du Parlement 
et de lui seul, et n'être responsable que devant lui. 
Si les fonctions étaient fusionnées, même un Parlement disposant formellement de l'initiative des lois (en plus de la Commission) verraient ses propositions de lois, par nature les plus fédérales, torpillées facilement par la Commission et le Conseil, en vertu du droit de la Commission de solliciter l'unanimité du Conseil en deuxième lecture pour des projets trop audacieux à son goût. 
Même un Président élu au suffrage universel affaiblirait le rôle du Parlement, car il ne serait pas responsable devant lui, mais devant ses propres électeurs. Ses commissaires seraient alors de simples secrétaires, et non plus des (quasi) ministres interpellables au Parlement. La démocratie y perdrait. Croit-on vraiment qu'il n'est rien de meilleur que le bonapartisme pour construire l'Etat Européen? A l'inverse si les commissaires étaient de vrais ministres, responsables devant le Parlement, se créeraient rapidement un poste inofficiel de "chef des commissaires" (a l'instar du président du conseil sous la IIIeme République) et par conséquent des "ministères" instables car dépourvus de la solidarité gouvernementale. Le Parlement affaibli, le Conseil se dresserait seul alors face à ce symbole de Président élu, et exercerait alors la réalité du pouvoir, c'est à dire qu'il dicterait les lois.