29 février 2008

Un appel de Solana resté sans écho

Paris, 29 février. Je lisais récemment dans l’excellent éditorial de Riccardi de l’Agence Europe que le haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité Xavier Solana avait lancé, le 1er février, un appel à une politique extérieure de l’énergie pour l’UE, dénonçant les dangers et les répercussions graves de son absence. Solana réclamait au moins, pour commencer, un meilleur échange d’informations sur les négociations nationales qu’aujourd’hui chaque Etat membre conduit à sa guise. On peut s’étonner du faible écho de cet appel dans les médias et du silence des gouvernements à son sujet.

26 février 2008

Confusion sur l'Union méditerranéenne

Paris, 26 février. La presse française se révèle dans l’ensemble incapable d’expliquer pourquoi une idée excellente, développer des actions concrètes dans le bassin méditerranéen pour le développement, l’environnement, le progrès économique, social et humain se heurte à tant d’incompréhension. Ce fut une erreur grossière, due à la totale méconnaissance de ce qu’est l’UE de la part du conseiller du Président qui s’en est fait le promoteur, de présenter ce projet sous la forme d’une Union semblant s’apparenter à l’UE. Ce fut une autre erreur de lancer ce projet sans consultation préalable de notre principal partenaire alors que celui-ci avait mal ressenti la tendance de notre président à s’attribuer le mérite quasi-exclusif du traité « simplifié » et de la libération des infirmières bulgares. Bâtir une Union entre pays dont plusieurs sont en conflit permanent et dont la plupart sont des dictatures n’a aucun sens. En revanche l’Europe, agissant en tant que telle, ne fera jamais assez d’efforts pour favoriser une évolution positive dans une région qui lui importe au premier chef. Mais elle doit agir unie et en tant qu’Union et non se diviser en initiatives désordonnées.

24 février 2008

Du Kosovo au Tchad

Paris, 24 février. Je reprends mes commentaires de l’actualité européenne après une interruption due à une panne de mon logiciel enfin rétabli.

La proclamation de l’indépendance du Kosovo avec l’appui d’une large majorité des Etats de l’Union me paraît soulever deux questions. Est-il conforme aux valeurs européennes de reconnaître le droit à l’autodétermination d’une ancienne province de la Serbie, le Kosovo, tout en refusant de reconnaître ce même droit à la minorité serbe du Kosovo ou aux Serbes de Bosnie ? Quand va-t-on commencer à réfléchir aux modalités d’adhésion d’une multitude de petits Etats balkaniques auxquels l’application des règles actuelles, six députés au Parlement, un commissaire, un minimum de voix au Conseil, donnerait une influence totalement disproportionnée dans les institutions ?

Les récents événements du Tchad rendent problématique l’opération humanitaire européenne promue par la France à la frontière tchado - soudanienne. Devrons-nous continuer à assister impuissants à la poursuite de ce qui apparaît comme un génocide rampant ? Notons cependant la signification de la désignation d’un général irlandais à la tête des forces européennes.

18 février 2008

Deux questions à propos du Kosovo

Paris, 18 février. La proclamation de l’indépendance du Kosovo avec l’appui de l’Union me paraît soulever deux questions. Est-il conforme aux valeurs européennes de reconnaître le droit à l’autodétermination d’une ancienne province de la Serbie, le Kosovo, tout en refusant de reconnaître ce même droit à la minorité serbe du Kosovo ? Quand va-t-on commencer à réfléchir aux modalités d’adhésion d’une multitude de petits Etats balkaniques auxquels l’application des règles actuelles, six députés au Parlement, un commissaire, un minimum de voix au Conseil, donnerait une influence totalement disproportionnée dans les institutions ?
En revanche, on peut se féliciter de l’attitude constructive des gouvernements qui, tout en s’opposant à la reconnaissance de l’indépendance du Kosovo, ont accepté l’envoi par l’Union d’une mission de 2000 fonctionnaires pour conforter le nouvel Etat.

11 février 2008

Appel à Jean-Louis Bourlanges

Paris, 9 février Le Monde vient de me faire savoir qu’après avoir retenu le papier que je leur avais envoyé en décembre, ils avaient dû renoncer à le publier. Le voici donc.

Tout ceux qui aiment l’Europe ont aimé Jean-Louis Bourlanges, son engagement sans failles, ses analyses pénétrantes, ses jugements impitoyables, à la fois pertinents et excessifs. Il fut un brillant président du Mouvement européen – France. Il fut surtout un exemplaire député européen, assez indépendant pour rejeter l’adhésion de trois pays qui prétendaient adhérer à l’Union en conservant une posture de neutralité parfaitement contraire à la solidarité européenne. Et voilà que ce député qui disait tout haut ce que d’autres pensaient tout bas annonce son intention de quitter le Parlement européen !

Il est sans doute trop tard pour le faire changer d’avis. Mais il n’est pas trop tard pour examiner les raisons q’il nous donne de sa décision dans un « grand entretien » accordé au journal le Monde des 2 et 3 décembre.

Sa motivation principale est que le Parlement, tout comme la Commission, serait devenu « un simple lieu d’arbitrage entre intérêts nationaux, un double du Conseil ». Si l’on peut regretter que les intérêts nationaux pèsent parfois trop lourd dans les débats, la vérité oblige à dire que c’est très loin d’être un cas général. Deux des principaux dossiers arbitrés à Strasbourg ces derniers mois, celui de la libération des services et celui du règlement sur les produits chimiques, en apportent la démonstration. L’affaire des services a opposé la droite et la gauche, même si, pour des raisons de culture nationale, la droite française était, sur ce sujet, proche de la gauche ; celle de la chimie a opposé les défenseurs de l’industrie à ceux des consommateurs. Dans l’un et l’autre cas, le Parlement est parvenu à un compromis que le Conseil n’avait pas obtenu et auquel il s’est finalement rallié.

De même, on s’étonne que Jean-Louis Bourlanges ose affirmer que « 90% des politiques et des financements restent nationaux ». Pour ce qui est des financements, il faudrait calculer le pourcentage dans les seuls domaines de compétence communautaire. Pour ce qui est des politiques, qui peut nier que les textes adoptés à Bruxelles et à Strasbourg orientent largement la plupart des politiques nationales, de l’agriculture aux transports, des budgets à la concurrence et de la pêche à l’environnement… ? N’est-ce pas la critique inverse que l’on entend sans cesse et qui est tout aussi infondée ? A vrai dire, l’exercice consistant à distinguer dans les politiques ce qui vient de Bruxelles ou des capitales n’a guère de sens dès lors que les orientations qui dictent les décisions communautaires sont arrêtées par les gouvernements nationaux.

En revanche, on ne peut que l’approuver quand il dénonce la stérilité de « la coopération classique entre gouvernements » dont l’échec de la stratégie de Lisbonne a fourni une nouvelle et éclatante démonstration, ou quand il stigmatise « la désinvolture avec laquelle on aborde (à Paris) les questions budgétaires et monétaires et celle du respect de nos engagements envers nos partenaires ». Voilà précisément pourquoi la présence du soldat Bourlanges sur le front européen demeure utile, nécessaire, indispensable. Il ne peut quitter le Parlement sans nous dire où et comment il va reprendre son combat pour que l’Europe, enfin sortie de sa crise institutionnelle, reprenne sa marche en avant.

04 février 2008

Réponse à Guy Plantier

Paris 4 février. A Guy Plantier qui a diffusé un message appelant judicieusement les militants européens à s’intéresser au choix du futur président de l’Union et à faire part de leurs réactions, j’ai répondu ce qui suit.

Vous avez raison de souhaiter l'implication des citoyens dans le choix du futur président, non de l'Union mais du Conseil européen. Le critère essentiel devrait être l'acceptation sans réserves de la méthode communautaire. Car le danger existe que le nouveau président se considère comme le gardien de l'intergouvernemental face à la Commission et au Parlement. Pour qu'il soit le président de l'Union et pas seulement du Conseil européen, il faudrait qu'il soit élu par les peuples ou par le Parlement, ce que sera désormais le président de la Commission. Pour l'avenir deux possibilités : ou bien le président du Conseil européen se limite à un rôle symbolique et protocolaire comme les chefs d'Etat en régime parlementaire, ou bien il devient le chef de l'Exécutif. Mais la deuxième hypothèse suppose une désignation démocratique et, à terme, la fusion avec la présidence de la Commission.

J’ajouterai que certains eurosceptiques contestent la légitimité démocratique de la Commission sous prétexte qu’elle n’était pas élue mais désignée par les gouvernements. Il en sera de même du futur président du Conseil européen mais, contrairement à la Commission, celui-ci ne sera pas investi par le Parlement ni responsable devant lui. Avec le nouveau traité la Commission sera élue par le Parlement, ce qui devrait lui donner une légitimité démocratique au moins égale à celle du président du Conseil européen.