31 décembre 2007

En avez-vous entendu parler ?

Paris, 31 décembre. J’apprends aujourd’hui que les sous-traitants de l’industrie automobile française ont bénéficié d’une aide de 3,82 millions d’euros pour la reconversion de leurs salariés victimes de la délocalisation de leur activité. Il s’agit d’une première intervention du nouveau fonds d’adaptation à la mondialisation dont je n’ai cessé de signaler l’intérêt depuis que sa création a été proposée. Il est consternant que ni les pouvoirs publics, ni les médias n’aient donné à cette décision prise mi-décembre par la Commission européenne le retentissement qu’elle méritait. L’opinion devrait être informée des modalités de l’aide qui est destinée non aux entreprises mais à la reconversion et au réemploi des travailleurs affectés par les délocalisations. L’occultation des nouvelles positives venant de Bruxelles n’est pas de nature à réconcilier les Français avec l’Europe et moins encore à la faire aimer.

29 décembre 2007

Deux ans déjà !

Platier, 29 décembre. Voilà deux ans, avec une interruption de six mois, due à la rédaction et à la publication de mon livre « Aimer l’Europe » chez Lignes de Repères, que je commente l’actualité européenne pour celles et ceux qui veulent bien me lire, sans doute parce qu’ils partagent ma conviction que la marche de l’Europe vers son unité est la grande cause qui transcende toutes les autres, car de cette unité dépendent à la fois la défense de nos intérêts, celle de nos valeurs et notre capacité d’exercer une influence sur la marche du monde. Je me suis efforcé de mettre en lumière des faits occultés par les grands médias, de les interpréter en montrant à chaque occasion le prix de l’unité insuffisante des Européens, de relater des manifestations auxquelles j’ai pris part, notamment le colloque d’ARRI sur le déjà oublié, injustement oublié, rapport Herbillon ou la commémoration du centenaire de Spinelli sur l’île de son enfermement à Ventotene.
Le blogger se pose constamment la question de son audience qui ne se mesure pas au nombre de commentaires, beaucoup de lecteurs internautes n’éprouvant pas le besoin de s’exprimer ou parfois maîtrisant mal la procédure à suivre pour insérer un commentaire. C’est pourquoi, en vous offrant mes vœux et en vous invitant à partager ceux que je forme pour notre Europe, je vous propose de me faire savoir si vous lisez régulièrement ou épisodiquement ce blog. Il va de soi que toute suggestion sur son contenu ou sa diffusion sera la bienvenue. Vous pouvez me répondre soit sur le blog « http //toulemon.blogspot.com », soit par courriel
« toulemon.robert@wanadoo.fr »
A toutes et à tous bonne année !

21 décembre 2007

Un succès de l'Europe et la réponse de JP Jouyet

Platier 21 décembre L’élargissement de l’espace Schengen aux nouveaux Etats membres d’Europe centrale est l’occasion de marquer l’immense succès que représente pour l’Europe un élargissement réussi garant de démocratie et de prospérité. Contrairement à ce que continuent à prétendre beaucoup de commentateurs ignorants des réalités européennes et à ce que croient beaucoup de Français, les difficultés que rencontre l’Europe depuis plusieurs années ne sont en rien dûes à l’élargissement. Bien au contraire, celui-ci est facteur de dynamisme et de croissance. Le professeur Christian Lequesne, vieil ami de l’AFEUR, qui enseigne à Sciences Po et à la London School of Economics le rappelait récemment dans les colonnes du Monde.

Je viens de recevoir une réponse très encourageante de J P Jouyet, secrétaire d’Etat aux Affaires européennes. Il approuve chaleureusement l’idée de donner, en coopération avec l’Allemagne, un éclat particulier à la prochaine célébration de la journée de l’Europe. Mais il ne se prononce pas sur ma suggestion, audacieuse il est vrai, d’associer les célébrations du 8 et du 9 mai.

19 décembre 2007

Encore les symboles

Paris 18 décembre Renseignement pris auprès de la représentation du Parlement européen qui vient de décider de mettre en valeur les symboles de l’UE, la France a bien été invitée à s’associer à la Déclaration des seize. On peut supposer que son absence sur la liste s’explique par le désir de souligner les différences entre le traité de Lisbonne et le traité constitutionnel, afin de justifier la ratification parlementaire. Une fois celle-ci acquise, il faudra reprendre le combat en ayant à l’esprit la célébration du 9 mai. Ci- dessous un extrait de la lettre que j’ai adressée sur ce thème à Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d’Etat aux Affaires européennes.

Ma suggestion est de saisir l’occasion de la prochaine journée de l’Europe, le 9 mai 2008, à la veille de la présidence française, pour corriger le message fâcheux donné à l’opinion par l’élimination des symboles dans le traité de Lisbonne. Une première initiative pourrait consister à donner un éclat particulier à cette journée, notamment par une allocution télévisée du président de la République illustrant la signification de ces symboles. Inviter les enseignants à faire partager à leurs élèves les valeurs européennes, celles de la réconciliation des anciens ennemis, de la paix durable, des identités multiples, de la solidarité entre les peuples serait un autre geste de grande portée. La journée de l’Europe, le 9 mai fait suite à la célébration de la victoire sur le Nazisme le 8 mai. Ces deux dates ont été parfois opposées, notamment lors de la tentative sympathique mais maladroite du président Giscard d’Estaing de substituer l’une à l’autre. Les réunir au contraire en une seule célébration ou même, dans un premier temps, établir un lien entre l’une et l’autre aurait une signification très forte. En effet l’appel de Schuman n’aurait pu être prononcé si le Nazisme n’avait pas été préalablement vaincu. Inviter l’Allemagne à célébrer avec nous à la fois sa propre libération et le premier geste de réconciliation européenne serait un éclatant moyen de faire comprendre à l’opinion et notamment aux jeunes générations la profonde signification éthique de la construction européenne.

14 décembre 2007

Le prix du livre européen réhabilite l'expression "Etas-Unis d'Europe"

Paris 14 décembre Bien que mon livre « Aimer l’Europe » ait été inscrit sur la liste des ouvrages sélectionnés en vue du choix du jury, je me réjouis de l’attribution du prix du meilleur livre européen au Premier ministre belge Guy Verofstadt intitulé « Les Etats-Unis d’Europe ». Il est de bon ton, depuis des années, dans les milieux européens, de récuser cette expression chère à Jean Monnet, pour ne pas effrayer les eurosceptiques, pour se démarquer du modèle américain ou encore pour indiquer que l’Europe n’a pas vocation à se doter d’un Etat. Autant de mauvaises raisons qui aboutissent à céder du terrain aux adversaires sans raison et sans profit. Oui, notre objectif est bien d’aboutir à un Etat européen, non un super-Etat mais un Etat minimal, fondé sur le principe fédéral de subsidiarité, non un clone du modèle mononational états-unien mais une Union plurinationale ayant pour devise « Unis dans la diversité ». Qu’un Premier ministre en exercice, le fut-il d’un Etat en crise, ose l’expression « Etats-Unis d’Europe », qu’un jury international couronne son ouvrage devrait contribuer à réhabiliter ce mot d’ordre et à rendre courage aux militants de l’Europe. N’ayez pas peur, comme disait le défunt pape !

Erratum. Une erreur s’est glissée dans mon étude « Que penser du traité simplifié ? » La durée du mandat du futur président du Conseil européen n’est pas, comme indiqué à tort, d’un an et demi mais bien de deux ans et demi renouvelable.

10 décembre 2007

16 Etats affirment leur attachement aux symboles de l'Union

Paris 10 décembre Réagissant à la suppression des symboles de l'UE dans le corps même du traité de Lisbonne par la CIG , un groupe de seize Etats membres, dont huit nouveaux adhérents, a adopté une déclaration -qui sera annexée au Traité- confirmant la valeur et la signification qu'ils continuent d'attacher à ces symboles. .

Extraits du texte de cette déclaration :
« (Les 16 Etats membres) déclarent que le drapeau européen (...), l'hymne tiré de l'"Ode à la joie "(...), la devise "Unis dans la diversité", l' euro en tant que monnaie de l'UE et la journée de l'Europe, le 9 mai, continueront d'être, pour eux, les symboles de l'appartenance commune des citoyens à l'Union européenne et de leur lien avec celle-ci . »

Les 16 Etats membres signataires sont :
BELGIQUE / BULGARIE / ALLEMAGNE / GRECE / ESPAGNE / ITALIE / CHYPRE / LITHUANIE / LUXEMBOURG / HONGRIE / MALTE / AUTRICHE / PORTUGAL / ROUMANIE / SLOVENIE / SLOVAQUIE .

On aimerait savoir si la France a refusé de se joindre à cette démarche.

09 décembre 2007

Que penser du traité "simplifié"?

Paris 9 décembre Cette analyse fera l’objet d’un tiré à part d’ARRI (Association Relations et Réalités Internationales).

Un traité qui n’est en rien simplifié mais qui sort l’Europe de l’impasse.

La première observation qui vient à l’esprit à la lecture du nouveau traité est qu’il n’est en rien simplifié. A l’effort de clarification qu’avait tenté la Convention en réunissant tous les traités antérieurs dans un corpus unique est substitué un ensemble de plusieurs textes : un traité sur l’Union européenne relatif aux institutions, un traité sur le fonctionnement de l’Union européenne relatif aux politiques, auquel s’ajoute la Charte des droits fondamentaux proclamée à Nice. Il s’agit d’amendements qui ne peuvent se comprendre qu’en se référant aux textes antérieurs. Aussi bien la formule traité modificatif ou réformateur correspond-elle mieux à la réalité.

Politiquement le jugement doit être nuancé. L’accord décisif est intervenu en juin à Berlin. Angela Merkel très habile et engagée, s’était alors bien accordée avec un Nicolas Sarkozy également très engagé et décidé à contribuer à la sortie de la crise ouverte par le rejet du 29 mai 05. La présidence portugaise a fait un excellent travail de mise en forme et obtenu, en octobre, un accord complet au prix d’un ultime marchandage avec les Polonais. Ce nouveau traité sera signé le 13 décembre à Lisbonne dont il portera le nom, ce qui devrait mettre fin à l’usage trompeur de l’adjectif simplifié, marque un incontestable recul par rapport au traité constitutionnel. Il n’en constitue pas moins un événement heureux qui évite une crise qui eût été, en cas de nouvel échec, d’une extrême gravité, met fin à un débat institutionnel lassant et permet de passer à autre chose.


L’essentiel des réformes est sauvegardé mais l’union politique n’est pas pour demain.

L’essentiel des réformes institutionnelles contenues dans le traité constitutionnel ont été reprises dans le nouveau traité, mais au prix de dispositions de nature à enlever à l’Union tout ce qui pourrait lui donner les allures d’un Etat. Ce faisant, on a gravement compromis les chances de l’Union de s’affirmer comme une entité politique ayant une identité distincte de celle de ses Etats membres. Ainsi le vote négatif des Français a conduit à un résultat que peu d’entre eux souhaitaient : une Union où l’économie l’emporte sur le volontarisme politique et la coopération interétatique sur la démocratie transnationale. Les reculs portent sur l’abandon du terme « constitution », la renonciation à faire mention des symboles de l’Union (drapeau, hymne, devise) qui n’en subsistent pas moins, l’abandon de l’affirmation suivant laquelle l’euro est la monnaie de l’Union, une disposition nouvelle protégeant les compétences des Etats en politique étrangère, une autre permettant au Conseil de demander l’abrogation d’une loi de l’Union. Au demeurant, ces lois continueront à être désignées sous les appellations peu compréhensibles de directive et de règlement au lieu de loi et loi-cadre qui figuraient dans le traité constitutionnel. La Charte des droits fondamentaux qui constituait le chapitre II du traité constitutionnel ne figure pas dans le nouveau traité mais celui-ci s’y réfère et lui reconnaît pleine valeur juridique. Le Royaume-Uni et la Pologne ont cependant obtenu de n’être pas liées par les obligations résultant de la Charte. M Tusk, récent vainqueur des élections polonaises a fait savoir que la Pologne renoncerait à cette dérogation, indication depuis lors démentie, sans doute sous l’influence du président Kaszinski.

La libre concurrence demeure malgré une concession aux Français

Les quelques innovations contenues dans la partie III du traité constitutionnel relative aux politiques ont été sauvegardées mais reléguées dans un deuxième traité sur le fonctionnement de l’Union où l’on retrouve la clause horizontale obtenue in extremis par Jacques Chirac disposant que toutes les politiques devraient prendre en compte les exigences sociales et environnementales. Mais l’essentiel de la partie III qui consistait dans la reprise de dispositions des traités précédents a disparu. Ainsi les orientations libérales ne seront pas gravées dans le marbre constitutionnel, satisfaction purement formelle pour les nonistes, dès lors que les dispositions des traités antérieurs demeurent et que leur valeur juridique n’est pas inférieure à celle que leur aurait conféré le traité constitutionnel. Un renforcement de la protection des services publics a été obtenu par les Néerlandais appuyés par les Français. De même Nicolas Sarkozy a obtenu que la concurrence, tout en demeurant une politique de l’Union, ne figure plus parmi ses objectifs. Modification de pure forme ou promesse d’un infléchissement de la jurisprudence de la Cour de Justice en faveur des objectifs sociaux et environnementaux ? La condamnation récente des abus de position dominante imputables à Microsoft n’en vient pas moins de montrer l’utilité de la politique de concurrence comme contrepoids à la puissance des plus grandes entreprises et comme facteur d’indépendance de l’Europe.

Un protocole protège les services d’intérêt général. Leur rôle essentiel est reconnu ainsi que le principe de l’accès universel aux services d’intérêt économique pour l’organisation desquels les autorités nationales, régionales et locales se voient reconnaître une grande marge de manoeuvre. La compétence des Etats membres concernant les services non économiques est garantie.


Le contenu des réformes institutionnelles

Les réformes retenues concernent la composition des institutions de l’Union et leur mode de décision.

Le Parlement comptera 251 membres, dont 96 pour l’Allemagne, 74 pour la France, 73 pour l’Italie et le Royaume-Uni. Pour la première fois la France voit pris en compte l’avantage démographique qu’elle doit à ses départements d’outre-mer et à sa natalité. L’Italie à qui le Parlement avait attribué un siège de moins que le Royaume-Uni a obtenu in extremis à Lisbonne un siège de plus en s’appuyant sur le nombre élevé de ses citoyens hors Italie. Le Conseil européen sera désormais doté d’un président n’exerçant pas de fonctions nationales dont le mandat renouvelable une fois sera d’un an et demi. Ce président sera désigné par le Conseil européen à la majorité qualifiée (55% des Etats, 65% de la population). La Commission ne comptera qu’un nombre de membres représentant les deux tiers du nombre des Etats. La rotation des nationalités sera égalitaire, ce qui veut dire que les grands pays, tout comme les moins grands, ne disposeront pas toujours de la présence d’un de leurs nationaux dans la Commission. Le président de la Commission sera élu par le Parlement après les élections européennes sur proposition du Conseil statuant à la majorité qualifiée. Celui-ci devra tenir compte du résultat des élections. La portée démocratique de ces dispositions dépendra de la capacité des partis politiques à se mettre d’accord sur leurs candidats avant les élections. L’un des vice-présidents de la Commission aura la responsabilité de la politique étrangère et de sécurité commune, sans toutefois le titre de ministre que lui attribuait le traité constitutionnel. Il disposera d’un service diplomatique. Il présidera le Conseil des ministres des affaires étrangères qui, comme le Conseil européen, échappera à la rotation semestrielle. En revanche la rotation des présidences persistera pour toutes les autres formations du Conseil.

La législation de l’Union qui conservera les noms de directives (devant être transposées dans le droit national) et de règlements (directement applicables) sera, en règle générale, soumise à la co-décision du Conseil et du Parlement, la Commission conservant son monopole d’initiative dans les domaines communautaires. Le mode de décision du Conseil est la question qui a soulevé les plus grandes difficultés. La règle d’unanimité subsiste en matière de politique étrangère, de sécurité, de défense et, ce qui est plus discutable, pour l’ensemble des décisions relatives à la fiscalité, à la protection sociale et à la création de recettes propres ou à la partie recettes du budget. Dans les autres domaines qui relèvent de la compétence de l’Union, la règle est celle de la majorité qualifiée définie comme 55% des Etats représentant au moins quinze d’entre eux et 65% de la population de l’Union. La minorité de blocage doit compter au moins quatre Etats. Les Polonais à qui le traité de Nice avait consenti, comme à l’Espagne, un nombre de voix (le mécanisme de décision relevait alors comme depuis le traité de Rome de l’attribution d’un quantum de voix à chaque Etat) presque égal à celui des pays les plus peuplés (27 au lieu de 29) avaient, dès la Convention, opposé une résistance acharnée mais solitaire à la double majorité. Après avoir en vain avancé une répartition des voix suivant la racine carrée des populations, ils ont obtenu le report à 2014 de la date d’application non du nouveau mode de décision, comme on le dit parfois, mais du nouveau mode de calcul de la majorité qualifiée ainsi que la formalisation, dans un protocole, de la déclaration dite de Joannina. En vertu de cette déclaration imposée par les Britanniques lors d’une réunion du Conseil européen tenue dans la ville grecque de Joannina, un Etat membre opposé à une décision prise à la majorité peut obtenir que la délibération se poursuive et que la décision soit retardée pendant « un délai raisonnable ». Enfin les Britanniques ont obtenu, pour le domaine de la sécurité intérieure (justice et police) de n’être pas liés par des décisions prises à la majorité sans leur accord.


Eurogroupe, Banque centrale, subsidiarité, coopérations renforcées

Le protocole relatif au Conseil de l’eurogroupe, qui figurait dans le traité constitutionnel est repris tel quel. Il est précisé qu’il siège de manière informelle, ce qui signifie qu’il n’a aucun pouvoir de décision, celui-ci appartenant au Conseil où siègent ensemble les représentants de pays membres ou non de la zone euro.

En dépit de ses protestations, la Banque centrale, qui souhaitait un statut à part, est rangée, au même titre que la Cour des comptes, parmi les institutions de l’Union mais son indépendance est confirmée.

Les dispositions relatives au contrôle de la subsidiarité à l’initiative des Parlements nationaux sont renforcées. La République tchèque a obtenu que le Conseil ait la faculté de demander à la Commission de proposer l’abrogation d’une directive ou d’un règlement.

La possibilité pour certains pays (au minimum neuf) d’aller de l’avant dans des domaines ne relevant pas des compétences exclusives de l’Union est réaffirmée mais demeure soumise à des conditions restrictives (accord du Conseil, nombre minimum de neuf Etats). Ces conditions sont plus souples et aucun nombre minimum de participants n’est exigé pour d’éventuelles « coopérations structurées » dans le secteur de la défense.


Protection des politiques nationales

Outre les dispositions relatives à la subsidiarité, de multiples sauvegardes des compétences nationales figurent dans les déclarations annexées au traité. On relève notamment une déclaration annexe préservant « le droit des Etats membres de prendre les dispositions nécessaires afin d’assurer leur approvisionnement énergétique » et, mieux encore si l’on peut dire, une déclaration d’origine britannique préservant « les responsabilités et les compétences de chaque Etat membre en ce qui concerne l’élaboration et la conduite de sa politique étrangère, son service diplomatique national, ses relations avec les pays tiers et sa participation à des organisations internationales, y compris l’appartenance au Conseil de sécurité des Nations unies. » Ceci augure mal des progrès de la politique étrangère commune de surcroît soumise à la règle paralysante d’unanimité. Tout acte législatif est exclu dans ce domaine et la compétence de la Cour de justice très limitée. Certains voient dans ces dispositions une sorte de revanche des diplomaties nationales.



Jugement d’ensemble

Les principales faiblesses du nouveau traité sont tout simplement celles qui pouvaient être relevées dans le traité constitutionnel. L’unanimité paralysante demeure en matière fiscale, pour la création de recettes propres de l’Union, pour la politique étrangère, pour la révision des traités. La composition de la Commission est loin de garantir son autorité. Ces faiblesses ont été aggravées par le souci des gouvernements d’aller au devant des craintes supposées de l’opinion et par l’exploitation habile qu’a su faire de l’échec des referenda en France et aux Pays-Bas une diplomatie britannique secondée par les jumeaux polonais. Tout ce qui pouvait paraître ouvrir la perspective de constitution d’une entité politique nouvelle a été soigneusement éliminé. Quelle chance a l’Union, dans ces conditions, de conduire une politique étrangère qui lui soit propre ? Beaucoup dépendra de la relation qui s’établira entre le nouveau président du Conseil européen à temps plein et celui de la Commission. Le risque d’une rivalité paralysante est évident. Malgré ses faiblesses, ce traité n’en représente pas moins un progrès considérable par rapport à celui de Nice. Il convient donc de faire ce qui dépend de nous pour qu’il soit ratifié.

La question reste posée de la finalité de l’Union. Il est plus que jamais clair que l’Europe ne pourra s’affirmer sur la scène du monde, y défendre ses intérêts, contribuer à un ordre plus sûr et plus humain si elle ne s’organise pas en une entité politique dotée d’un gouvernement, non certes un Etat fédéral mais une Union fédérale d’Etats et de citoyens au sein de laquelle l’intégration économique et la coopération politique se rejoindront. Deux innovations du traité reprises du traité constitutionnel, le président du Conseil européen déchargé de fonctions nationales et le haut représentant pour la politique étrangère intégré à la Commission comme vice-président pourraient conduire, le moment venu, à la formation d’un gouvernement européen. Il suffirait de fusionner les deux présidences et de réunir autour d’un président unique un cabinet politique composé de plusieurs vice-présidents de la Commission travaillant en liaison étroite avec les ministres nationaux comme devra le faire le haut représentant pour la politique étrangère. Mais cela supposerait une volonté politique qui aujourd’hui fait défaut. Les prochaines élections européennes seront un défi pour les partis politiques qui se veulent favorables à la construction européenne. Seront-ils capables de présenter en temps utile leurs candidats à la présidence de la Commission, sachant que le choix du président par les gouvernements devra tenir compte du résultat des élections ? L’Europe ne progressera pas sur le terrain politique si elle ne réussit pas à établir un lien de confiance avec ses citoyens.

Tous les Etats ne seront pas disposés à s’engager dans cette voix ou n’y seront pas prêts en même temps. Aussi convient-il de mettre à profit les formules de différenciation que prévoit le traité en veillant à ménager l’avenir. N’oublions jamais que si une avant-garde réussit, les autres la rejoindront comme l’a déjà montré la brève histoire de la construction européenne.

04 décembre 2007

L'Europe face à Poutine

Paris, 3 décembre. Le feuilleton des incohérences européennes se poursuit. Merkel dénonce le mépris de Poutine pour la démocratie. Sarkozy le félicite. Qu’adviendra-t-il quand l’Europe aura un porte-parole et un président du Conseil européen ? Ajouteront-ils à la cacophonie ou joueront-ils les muets du sérail ?
Une bonne nouvelle pour nous consoler : le projet Galileo est sauvé par un vote à la majorité auquel l’Espagne, un moment seule, s’est rallié et grâce aux efforts opiniâtres et intelligents du commissaire Jacques Barrot. Bravo M. Barrot !

01 décembre 2007

L'Europe face à la Chine

Paris, 1er décembre. A peine avais-je envoyé mon dernier message regrettant que l’Europe ne s’exprime pas d’une seule voix face à la Chine qui nous inonde de ses produits sans véritable réciprocité, que j’apprenais la présence à Pékin, quasi simultanément avec celle de notre Président de JC Juncker, président de l’eurogroupe, de JC Trichet et des deux commissaires, Almunia et Mandelson. On peut espérer que sur le chapitre du déséquilibre commercial et de la sous-évaluation du yuan le langage tenu aux Chinois a été convergent. Mais comment ne pas s’étonner de l’absence apparente de tout lien entre la visite à Pékin du chef d’Etat français et des émissaires européens ? Ajoutons que le front commun européen est fissuré sur les violations massives des droits humains en Chine et sur l’embargo sur les armes. Angela Merkel a reçu le Dalaï Lama et n’est pas prête à lever l’embargo décidé après Tien An Men. Il semble que la position française soit plus souple. Des divergences d’appréciation sont inévitables et légitimes. L’essentiel est que chacun se plie à la position majoritaire de l’Union car chacun, y compris les minoritaires, ont intérêt à ce que la position de l’Union se renforce, ce qui suppose l’unité.