26 septembre 2009

A propos de la Poste et du G 20

Paris, 26 septembre
Le démantèlement des monopoles nationaux était dans la logique du marché unique. Il aurait pu, dans certains cas, prendre la forme de la création de services publics européens. Un subtil mélange d’ultra-libéralisme et de nationalisme y a fait obstacle, même dans des cas où les avantages d’un service européen unifié étaient évidents. La gestion des nouveaux réseaux de télécommunication, le contrôle aérien, la création d’un réseau européen de trains à grande vitesse, les interconnexions électriques, la surveillance des frontières et même une Poste qui doit assurer une péréquation au profit des régions excentrées à faible population seraient assurés avec une meilleure efficacité et sans doute un moindre coût, par des agences européennes intégrées. Il en existe certes quelques unes mais qui se limitent le plus souvent à tenter de coordonner ou à aider les services nationaux. Tel est le cas par exemple de l’agence Frontex chargée non de la surveillance des frontières comme on le dit mais de l’aide aux Etats dans ce domaine. Ajoutons qu’un timbre unique pour les lettres, un tarif unique pour les téléphones portables, un uniforme unique de gardes-frontières contribueraient à développer le sentiment d’appartenance à l’Union. Un seul domaine, celui de la monnaie, a miraculeusement échappé à cette résistance des Etats face à l’Union. L’effet protecteur de la monnaie unique pendant la crise financière n’est hélas connu que des spécialistes.
Je commenterai plus tard un G 20 dont la portée réelle est encore difficile à apprécier. Je note seulement l’absence de toute référence aux droits fondamentaux dans une instance qui se présente comme l’embryon d’un gouvernement mondial.

19 septembre 2009

Que penser de l'investiture de Barroso?

Paris, 19 septembre
Le succès plus large que prévu obtenu par Barroso devant le Parlement : 382 voix sur 718 votants (sur 736 députés) s’explique peut-être par l’excès de certaines critiques. Barroso a souffert du climat d’euroscepticisme généré par l’échec du traité constitutionnel. La passivité qui lui est reprochée pendant la crise financière résulte largement de l’attitude des gouvernements des principaux pays soucieux de garder la main. Une initiative qui aurait échoué faute de soutiens eut été pire. Enfin, il est conforme à la démocratie qu’un Parlement dominé par la Droite désigne un président de Commission de la même tendance. L’affaiblissement de la Commission risque de s’accentuer encore si de nouvelles adhésions conduisent à augmenter encore le nombre de Commissaires venant de pays à faible, voire très faible population. On s’étonne que ce problème soit si rarement évoqué. Il est vrai que la seule solution raisonnable – laisser le président libre de composer son équipe – déplait à tous les gouvernements, hélas nombreux, qui s’accommodent d’une Union paralysée par le glissement vers l’intergouvernemental.

15 septembre 2009

Il faut que la France commémore la libération de l'Europe centrale

Paris, 15 septembre
Les archives récemment dévoilées par le Foreign Office ont confirmé les premières réactions d’hostilité à la perspective de réunification de l’Allemagne qui étaient partagées par Margaret Thatcher et François Mitterrand après la chute du mur de Berlin, Mitterrand ayant cependant la lucidité de juger, contrairement à son interlocutrice, que la réunification était inévitable. N’avoir pas accompagné le sentiment de libération qui fut celui des peuples si longtemps soumis au joug soviétique n’en fut pas moins une faute lourde de conséquences. On peut se demander si le moindre engagement européen de l’Allemagne d’aujourd’hui ne s’explique pas, au moins en partie, par ce manque de solidarité européenne, alors que les Etats-Unis du premier Bush apportaient au chancelier Kohl un appui total. Aussi attend-on avec curiosité que se concrétise l’intention prêtée à Pierre Lellouche, nouveau secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, de réussir, à l’occasion de la commémoration de la chute du mur, le rendez-vous franco-allemand qui a été raté il y a vingt ans. ( Le Monde daté du 12 septembre).

02 septembre 2009

Un texte étonnant de Léon Blum

La Cadière, 2 septembre 09
La Revue Commentaire publie, dans son numéro d’été, entre deux excellents articles sur l’Europe de Gilles Andréani et de Jean-Lous Quermonne, un article paru dans le Populaire du 21 mai 1930 à propos du projet Briand d’un « lien fédéral » respectant entièrement la souveraineté des Etats membres. Sous le titre « On ne fédère pas les pays européens sans s’attaquer résolument à la notion de souveraineté » Blum éclaire admirablement cette contradiction qui aura si longtemps paralysé la politique européenne de la France. Qu’on en juge par quelques extraits de ce texte surprenant par la date de sa rédaction. « Il faut sans doute un commencement à tout, surtout à de si grandes tâches. Mais encore est-il nécessaire que les premiers pas… soient faits dans la bonne voie. Or, je redoute que M. Briand s’engage ici dans une impasse… Tout en invitant l’Europe à souscrire à ce premier régime d’Union fédérale, il pose en effet comme un principe absolu l’intégrité des souverainetés actuelles…L’idée avec laquelle il faut en finir est celle de cette souveraineté sans limite et sans mesure de chaque nation, à l’intérieur de ses frontières fortuites. Je dis fortuites parce qu’il n’y a pas une seule nation au monde qui vive dans un cadre ethnique, géographique, historique offrant un caractère de nécessité. L’ordre et la paix ne sont possibles entre les nations que si elles se soumettent à des lois communes…